Ephèse / Efes n° 1

ÉPHESE n° 1 : Quatre migrations pour une seule ville.
Au sud d'Izmir et immédiatement au nord de Kusadasi, Efes, ou plutôt l'antique Ephèse, dort en bordure de la plaine alluviale du Kuçuk Menderes. La modeste localité de Selçuk semble servir d'antichambre à la métropole antique. Ses vestiges sont disséminés dans un paysage de collines où quelques arpents de vigne le disputent aux herbes folles.
On comprend mal le destin exceptionnel d'Ephèse si l'on imagine pas quelles étaient les dispositions du site de l'Antiquité. L'actuelle plaine alluviale était alors une étendue marine, le golfe de Latmos. Le petit Méandre y avait son embouchure. Au cours du 1er millénaire avant J-C, ce site privélégié était relié à Sardes, capitale du royaume lydien, par une route qui se branchait à cet endroit sur la voie royale qui traversait le royaume des Perses achéménides. Ainsi Ephèse, en liaison, via Suse, avec l'Asie des steppes et le golfe persique, était-elle le terminus portuaire d'une artère commerciale longue de 3 000 km. Débouché naturel d'un grand axe transcontinental, Ephèse avait la vocation de drainer les richesses du Moyen-Orient.
Longtemps l'Histoire a encouragé le destin de cette cité marchande. Quatre implantations successives jalonnent l'évolution de la ville. Les premiers à débarquer furent les Grecs ioniens (fin du XIème siècle avant J-C). Ils assimilèrent des populations indigènes (Cariens) et construisirent une première ville. De bonnes relations s'établirent entre Ephèse et le royaume de Lydie. Cependant, Crésus obligea les Ephèsiens à quitter leur position primitive (et fortifiée). La ville fut établie autour du temple d'Artémis, dans la plaine. Cette deuxième implantation correspond au temps de la domination perse et s'étend jusqu'à l'arrivée d'Alexandre. Après la bataille d'Ipsus (301 avant J-C), Lysimaque, ayant reçu l'Asie Mineure (lors du partage des dépouilles d'Antigone), fait rebâtir Ephèse sur les pentes du mont Koressos et du mont Pion, face au golfe du Latmos. La ville ainsi parvenue à sa troisième implantation est dotée d'une enceinte fortifiée, longue de 9 km, gratifiée d'un nouveau port gagné sur les marais. Lysimaque oblige les populations de diverses villes à venir s'installer dans la nouvelle cité qui connaît un rapide et extraordinaire essor. Lorsque la domination romaine supplante l'autorité des Séleucides, la ville, d'abord administrée par les rois de Pergame, est ensuite directement rattachée à Rome. Ephèse est alors la première cité impériale de l'Asie Mineure, en dépit de la désastreuse occupation de Mithridate (88-84) et du tremblement de terre de l'an 17 après J-C. En 55 et 58, l'apôtre Paul viendra y prêcher et y sera incarcéré, sans doute pour avoir dérangé l'activité commerciale qui fleurit à proximité du temple d'Artémis. Une communauté chrétienne s'y implante néanmoins et l'apôtre Jean s'y serait fixé pour y finir ses jours à la fin du 1er siècle de notre ère. L'invasion et le pillage du temple d'Artémis par les Goths, en 263, n'empêchent pas Ephèse de connaître une ère de grande prospérité jusqu'à la fin du règne de Justinien, au VIème siècle. C'est à cette époque que la ville, fuyant l'envasement de son port, se déplace pour une quatrième fois pour aller se fixer au nord, sur la colline d'Ayasoluk. (à suivre en page n° 2)